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je suis transparente...mon père est vitrier.
7 septembre 2007

Qu'as tu appris à l'école 2...

Me voilà,bac en poche.....Septembre 70 , suis instit. Pas prof comme on dit maintenant...non, instit. J'ai toujours détesté le milieu scolaire  et voilà ,que je décide d'y rester. Est ce que je me punis à ce point là? Est ce que je veux me soigner ? Je ne me pose pas de questions...Je fonce. A moi la grande vie...

A nous deux les quartiers Nord.  Prendre 1 ou 2  bus pour quitter le centre ville et arriver tout là bas..très exotique pour moi. Je m' éblouis toute seule de voir que je sais me débrouiller ! On a les victoires qu'on peut...

J'arrive dans des écoles ou les élèves sont souvent presque plus grands que moi, je fais très jeune ,eux souvent la vie ne les a pas épargnés .Il me semble qu'on est pareil. Je me range de leur coté.Beaucoup d'immigrés, de gitans, de familles en difficultés , de gosses dans des situations intenables. Je me retrouve dans des écoles ou il y a 5 classes de français,et une ou deux d'immmigrés. Je suis la 6 ème remplaçante..c'est pas grave hein, de toute façon ils tiendront le marteau piqueur comme leur père,et les filles feront des bébés qui nous envahiront....Les quartiers ne sont pas pris en compte..pas encore  de ZEP, pas d'argent ,pas de soutien. Des instits souvent plein de certitudes,ou qui voient qu'il faudrait faire autrement, mais qui ne savent ni  vers qui ou quoi  se tourner...Des enfants avec des vies dont j'ignorais l'existence..Des rejets qui me font mal...Une petite fille trop pénible,agressive , mise à l ' écart ...j' apprends au détour d'une discussion que son père est en prison, sa mère s' est suicidée, son grand père l'a violée et sa grand mère lui dit que c' est sa faute puisqu'elle n'est pas sage...37 ans après, je n'ai pas oublié....

Etant remplaçante ,je remplace. Tous les niveaux. Je suis toujours sans formation . Je révise les leçons le soir ,et je fais  la classe comme on me l'a faite... Je suis contente de retrouver mes élèves chaque jour. Mais puis je le dire...j'ai 18 ans,20 ans ,j 'aime le contact des enfants, je  suis  avec eux..Mais ai je vraiment conscience de ma responsabilité ? Est ce que je fais ce que je dois faire? Personne ne me le dit ... Les classes sont refermées sur elles même , les instits sont bien plus vieilles que  moi. Elles parlent de  mari , enfants ,recettes..je m 'en fous. Je copine avec les nouvelles pas plus au fait que moi. Ma vie est malgré tout ailleurs...

Je navigue dans Mars. Un coup le Nord,  un coup le Sud. Parfois les quartiers chics ,qui me ramènent  à ma scolarité...les enfants sont moins faciles d'accès, moi la remplaçante ils pensent que je suis une sous -instit..déjà que dans l'imagerie familiale ,l 'instit n' a pas vraiment réussi, alors la remplaçante...

Me voilà " à cheval " sur 5 classes. Frustrée , de ne pouvoir avoir de vrais rapports  avec mes élèves, cantonnée au chant,gym et récitation...Drole d'administration. Jetée dans le tourbillon sans aide. Dans toutes ces années, je n'ai vu ni Inspecteur , ni un de ses sbires...rien. Heureusement , je me prends au jeu..je commence à chercher, à comprendre. Je suis jeune, des instits  me draguent gentiment et j'en profite pour parler.... pédagogie!

Je vois des situations d'un autre monde . Des écoles qui se sont arrêtée au bon vieux temps des choristes, d 'autres qui se lancent à corps perdus dans la nouveauté. Les réformes sont à la mode. C 'est tout ou rien! Total maths moderne, méthode globale..ou  B.A BA et les tables de multiplications répétées à l'envie en martelant le bureau (si,si). On commence à parler psychologie enfantine, droits de l'enfant...

Le premier inspecteur qui vient me voir (je passe mon CAP)  ose me dire que je ne dois pas faire de leçon  particulière de langage et lecture puisque j'ai un Ce2...Quid donc ,  des 2 petits yougoslaves qui viennent d'arriver et qui ne connaissent pas le fançais?..Et me reproche pendant 3 plombes , d' avoir  un seul cahier plutôt que deux...Je ne peux me taire , je discute ,j 'argumente ..je lis beaucoup de livres de pédagogie !!!

J 'atterris en maternelle. Passés les premiers mois assez déstabilisant..mais que peut on faire avec 30 petits qui grouillent, qui se mouchent, qui se lassent vite , qui veulent des gâtés, leur maman ,aller faire pipi....je cherche, je demande , je lis, j'observe. J 'ai trouvé ma voie . Une certaine liberté , beaucoup de possible, une grande part de recherche , de la créativité et de la proximité avec les parents et les enfants . Pendant 23 ans .Pour ne pas ronronner , je change de sections chaque fois que je le peux.Je jette  chaque année mes préparations,mon cahier journal . J'ai des enfants en intégration , celà est  parfois  difficile, celà  me semble  parfois assez factice ,je suis  heureuse de le faire. Je n'ai pas moins d'élèves pour autant et pas d'AVS   la plupart du temps.

Le système a beaucoup changé . La hiérarchie est de plus en plus présente, pas forcément à bon escient. Les réformes valsent, pas toujours suivies d 'effets...puisque pas expliquées , pas motivées , pas justifiées...Les enseignants sont peut être des mammouths mais   de bonne volonté. Ils se coltinent des effectifs lourds, des demandes incessantes, des doutes permanents , un monde qui fuit en avant et une école qui hésite entre freiner et courir devant. Les heures Français Maths diminuent en peau de chagrin, les exigences restent  grandes. Des nouvelles matières voient le jour. Tout se met en place en comptant uniquement sur le courage et la bonne volonté. Les jours de formation diminuent et de toute façon  , c'est   au bon vouloir de chacun. Tout change à l'école comme dans la vie. La vie des parents est bousculée, celle de nos élèves aussi . Le rôle de l'enseignant est remis en cause. Les instits sont montrés du doigt..la retraite , les vacances, la sécurité de l' emploi...Les professeurs des écoles arrivent , un certain nombre ont déjà travaillé. Souvent dans des postes à responsabilité . Le choc des cultures peut être rude . Je passe le concours interne . Me voilà prof des écoles. Réussir un concours pour faire le même métier ,de la même façon, juste pour une revalorisation financière...certains instits le vivent mal...

Les inspecteurs et consorts sont plus présents. Les parents omniprésents , pas toujours pour la bonne cause. Les mairies naviguent entre électeurs et enseignants.

Heureusement, malgré les difficulté le moteur  reste :les enfants. En tout cas,pour moi, j 'ai toujours été contente d'être avec eux ,et je l'espère qu'ils étaient heureux aussi.

Partie à la retraire en 2004 . Pour des raisons personnelles. Instit depuis l'âge de 18 ans.Envie de vivre à mon rythme . Les relations avec les parents qui se compliquent . Moins envie de jouer le jeu. Désir  de rentrer à la maison. Avec 3 enfants , je peux partir et être payée ,même si je n 'ai pas fait toutes mes années (pour une fois qu 'ils me servent!!). Je n'ai pas le maximum de ce que j 'aurai pu avoir ..tant pis!!!Je plonge dans l'inconnu ,pour moi..ne plus travailler...!!

C'est long,trop long..quand je vous disais que j'écris comme dans mon journal...

Je reviendrai sur parents, instits, élèves..

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Commentaires
L
@ marie : C'est sur il use meme beaucoup....quand j'ai senti que je n'avais plus envie,je suis partie.Mais sincèrement,tout ce temps ,j'ai aimé.
M
ah ben voilà, sommes collègues... <br /> J'ai quitté les classes (spécialisées, pour enfants aveugles), pour un bureau dans une maison du handicap. C'est tout un chagement, super intéressant, l'impression de faire autre chose, parce que ce métier, quand même, il use un peu...<br /> Moi, j'avais l'impression, ces dernières années, de ne plus avoir de surprises.<br /> Bonne soirée
L
@ art-truk :Merci...
A
merci pour ce récit.. <br /> et non non ça n 'est pas trop long! au contraire! moi je te lirais encore pendant des heures !
je suis transparente...mon père est vitrier.
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