Ah ,te voilà toi..
Coup de fil de ma sœur. "Notre père est mort". Qu' est ce qui me pousse à aller à ton enterrement ? Ne pas la laisser y aller seule ? La curiosité d' en apprendre un peu plus sur ta vie? Voir si vraiment, çà ne me fait rien? Surement un peu de tout celà. Ma fille ainée nous accompagne.
Nous sommes en retard. Il y a une quinzaine de personnes.Ta femme, sa fille, son beau fils et sa petite fille.Ton frère. Des amis à elle qui passaient par là pour les vacances. Les inévitables mémés qui viennent aux enterrements.Tout le monde semble ailleurs, limite pressé. Seule la petite fille pleure. Les paroles du prêtre sont insipides, inodores, incolores..à sa décharge ,il ne te connait pas. Il demande si quelqu 'un veut dire quelques mots. Ton frère se lève. Vous vous voyiez rarement, je me dis qu' il va raconter vos liens d' enfance...non, il se lance dans une diatribe sur son respect pour un de ses amis ,moine tibétain (!)....
Nous sortons. Le curé s' approche de nous, tout sourire..pour nous raconter que l' après midi, il a atelier poterie et qu' il s' éclate . Arrive une dame qui s' approche de ta femme, et qui lui demande :Mais qu' est ce que vous faites là?..C ' est B. ,il est mort..ah, bon, je l' ignorais..Elle s' éloigne et j' apprends que c' est l' infirmière qui te soigne depuis des mois...Que pouvait bien faire ta femme, devant les tentures noires et mauves, en noir devant l' église??? Prendre des renseignements sur le cours de poterie....Ton frère parle de tout de rien..surtout de rien..les amis se demandent ce qu' ils vont faire l' après midi..Et nous sommes partagées entre fou rire anxieux, sentiment incroyable d' une quatrième dimension et envie de fuir....
Tu pars vers le crématorium, nous choisissons la fuite...Ma sœur me demande si je veux participer aux frais d' enterrement..je dis non..je pense à cet homme qui a fait un procès à sa mère pour les cadeaux d' anniversaire qu' il n' avait pas eu... Je n' ai ni rage, ni haine...j' ai un pincement au cœur pour toi qui a si bien réussi ce que tu voulais dans ta vie.."que les autres te foutent la paix". Maintenant quand j' entends Férré dire "tout seul ,peut être mais peinard.."..je te vois...Mais c' est NON.
Au retour, en boucle dans mon cœur..." Tu peux regarder ,va.Tu ne verras rien qui t' appartiennes. Pas un objet qui te retienne. On t' a effacé de nos joies.Comme toi, tu nous effaças. "