Aujourd' hui on dirait...
Novembre 1964. Je suis en 6 ème. Je n' aime pas l' école. Toujours pas.
Je me sens obligée tout le temps. Obligée d' etre sage.Obligée de bien écrire.Obligée d' écouter. Obligée d' aller à ce p&&tain cours de couture. Obligée d 'etre là ...
Je me sens moche, oui déjà. Moche et sale. Je ne sais plus si les mains existaient encore. Celà ne change rien. Je porte ce sentiment de mocheté , comme un saint sacrement , là en moi. Je sens encore ce poids quand j' y pense...
Mon moment de vie, c' est le court trajet entre la maison et le collège. Un petit quart d heure...Je regarde les autres, les plus grands surtout, ceux qui se tiennent la main..je ne sais pourquoi, celà me donne envie de pleurer...
Alors pourquoi ce jour là plutot qu 'un autre ?..Pourquoi eux ?...Je ne sais plus. Je me souviens juste de ce coup dans le coeur quand je les ai vus. Je ne sais plus s' ils étaient plus beaux que les autres..Je me souviens juste que j 'ai eu en les voyant, la vision de l' amour que je n' aurai jamais. Que celà m' a paru insupportable.Je me suis sentie trop moche, trop sale, trop transparente, j' ai eu honte de moi, encore plus ce jour là...
Je suis allée en cours. J' ai encore eu un mot sur mon carnet . Je suis rentrée. Avant d' aller me coucher, j' ai pris dans l' armoire à pharmacie des cachets. Beaucoup . Je me suis couchée. J' ai dormi 48 heures non stop. Le docteur est venu, il a dit que j 'avais eu un choc...Quand je me suis réveillée, on ne m' a rien dit, pas posé de questions. Je suis devenue la pooovre Luisasi qui avait dormi parce qu' elle avait eu un mot sur son carnet...
Je ne sais plus si je voulais mourir ou juste fuir..Je ne sais plus quand j' y ai pensé dans la journée... Je sais que j' ai tout avalé en silence,sans crainte...
Je ne sais plus ce qui m' a le plus fait mal ...je crois que c' est qu' on puisse imaginer que ce soit parce que j' avais eu une mauvaise note..moi, qui m' en foutait tant...c' était si mal me connaitre.
Je ne leur ai jamais rien dit...meme quand cela les faisait sourire. Je ne leur ai jamais dit que j' étais cette petite fille qui avait voulu mourir simplement parce qu' elle était sure que jamais elle n' aurait droit à ce geste tendre..qu' on la prenne par la main...
Aujourd' hui on dirait TS.